dimanche 27 juillet 2014

Va, pensiero, sull'ali dorate...

On sait à peu près tous ce qui trotte dans la tête du pro-palestinien : "les Européens ont exterminé les juifs et pour s'en excuser, ils ont offert à leurs descendants la terre des Palestiniens. Oui, 'terre promise' pour les concernés mais 'propriété des autres', dans la pratique. Et l'Ancien Testament n'est pas en soi un chapitre pertinent du droit international; la promesse de leur Dieu ne concerne que ceux qui veulent y croire, pas la Terre entière. Par ce fait, les Européens ont semé l'antisionisme dans le cœur des musulmans; et certains, qu'on le veuille ou non, ont glissé dans l'antisémitisme. Un énième pied de nez du malin Européen"...

Disons qu'il manque Herzl, 1917 et 1937 pour expliquer la genèse mais la trame est plutôt celle-ci. Israël est en soi une injustice. C'est du vol, de l'expansionnisme, de la colonisation. Les Européens ont fauté, les Palestiniens ont trinqué. Ouh là là, ce n'est pas moi qui le dis, attention alors, c'est Ben Gourion en personne : "Pourquoi les Arabes feraient-ils la paix ? Si j'étais, moi, un leader arabe, jamais je ne signerais avec Israël. C'est normal : nous avons pris leur pays. Certes, Dieu nous l'a promis, mais en quoi cela peut-il les intéresser ? Notre Dieu n'est pas le leur. Nous sommes originaires d'Israël, c'est vrai, mais il y a de cela deux mille ans : en quoi cela les concerne-t-il ? Il y a eu l'antisémitisme, les nazis, Hitler, Auschwitz, mais était-ce leur faute ? Ils ne voient qu'une chose : nous sommes venus et nous avons volé leur pays. Pourquoi l'accepteraient-ils ? Ils oublieront peut-être dans une ou deux générations, mais, pour l'instant, il n'y a aucune chance. Alors, c'est simple : nous devons rester forts, avoir une armée puissante. toute la politique est là. Autrement, les Arabes nous détruiront" (cité par Nahum Goldman, Le Paradoxe juif).

Bah, le problème est qu'ils n'ont pas oublié, les suivants. Des diplomates et des militaires ont tout fait pourtant mais ça n'a pas marché. Le Hamas continue de rêver. Le Fatah a tout compris, lui, et il a bien raison : Israël est un Etat qui a désormais toute sa légitimité dans cette région. Son droit à l'existence est plein et entier. Il ne saurait être accompagné de "mais", de "sauf que", de "pourtant". Et sans visser cette réalité dans les petites têtes, on déplorera encore longtemps les morts et les blessés. Car qui dit Etat souverain, dit droit de se défendre...

Serais-je un vendu ? Non, je suis un "embarrassé". Car Gaza est encore à feu et à sang. L'un a lancé des roquettes, l'autre des bombes. L'un a commencé, l'autre rétorqué. Et nous autres, tiers au conflit, sommes embarrassés. Ce qui semble ignoble à la majorité n'apparaît nullement repoussant pour une minorité. On a peur de soutenir l'un pour ne pas passer bourreau de l'autre; on a peur de maudire l'un pour ne pas passer complice de l'autre.

Israël engloutit miette par miette toute la "Palestine", toutes les guerres lui ont permis d'étendre son territoire. Et ceux d'en face en sont encore à revendiquer leur ancienne terre. C'est fini coco, fini. C'est un fait accompli. Il faut passer à autre chose. A accepter l'autre et à négocier avec lui. La "résistance", c'est terminé. Nos idéalistes en sont encore à saisir le col du voisin et à lui faire cracher une haine contre Israël. Nous sommes en Orient; avec des Orientaux qui préfèrent plus gigoter que réfléchir...

La question palestinienne n'est pas une question confessionnelle. Ce n'est parce qu'on est musulman qu'on pleure pour les innocents qui ont péri sous les bombes israéliennes. Et ce n'est pas parce que c'est Israël et donc "des" juifs qui en sont responsables qu'on geint et qu'on se déchaîne. Ce n'est pas une affaire religieuse, c'est une affaire de droit, de liberté. Normalement. Les torts et les louvoiements de l'Etat hébreu n'expliquent en rien la confusion et le manque d'acuité des Palestiniens. Car si la disproportion est un crime, la riposte est un droit...

La diplomatie n'a qu'un but : obtenir un résultat. Le ministère de la parole ne sert à rien. C'est bien beau de foncer sur des "moulins à vent" et d'aligner les mercuriales mais ça n'apaise rien à Gaza. Le citoyen peut crier; le gouvernant doit agir. Erdogan et son ministre des Affaires étrangères, qui adore écrire des théories et les appliquer ensuite coûte que coûte, hurlent et fouettent l'ardeur des islamistes et plouf...

Et quand les batteurs de pavé prennent la relève, ça devient carrément contre-productif. Les "théories du complot", les "rapports de force", les appels à Hitler, les slogans du type "il arrivera un temps où on m'insultera pour ne pas avoir tué plus de juifs" ! Défendre une cause avec ça ! Avez-vous déjà vu un "brailleur" s'engager dans une association humanitaire et aller à Gaza ? Êtes-vous déjà tombé sur une famille qui décide d'adopter ou d'héberger des orphelins ? Pourquoi boycotter seulement les produits israéliens et se taire contre leurs "frères" et satrapes arabes dont la fortune dépasse de loin celle des hommes d'affaires israéliens ? 

Un être humain normalement constitué pleure pour Gaza. Un musulman normalement constitué peut ressentir un plus, c'est dans la nature des choses, il gémit pour Gaza. Fustiger le comportement criminel de l'Etat ne doit pas se transformer en haine du juif. Ce n'est pas une "occasion" de vomir une aversion. Or, c'est le "n'importe quoi" qui règne dans les cœurs et dans les cervelles. C'est cela le drame des Gazaouis, beaucoup de leurs défenseurs sont tout bonnement insensés. Et le temps que ces derniers masturbent leurs pauvres esprits et comblent leur ennui en exprimant des revendications d'un autre âge, eux, qui y vivent et qui n'ont pas le temps d'être des idéalistes bien calés au chaud dans leur fauteuil, agonisent et rendent l'âme. Les corps n'ayant même pas droit à leurs quatre planches...

Choeur de Radio France - Pater de l'Espérance

mardi 8 juillet 2014

A la va comme je te pousse...

Conseil d'Etat (27/07/2001). Une bonne sœur surveillant en prison peut porter sa cornette et recevoir une prime de sujétion spéciale. Laïcité ? Circulez, rien à voir : "Considérant que la convention conclue le 6 décembre 1995 entre l'Etat, représenté par le garde des sceaux, ministre de la justice et la congrégation des sœurs de Marie-Joseph et de la Miséricorde a pour objet de permettre aux membres de cette congrégation d'apporter leur concours au fonctionnement de trois établissements pénitentiaires sous la forme soit de "prestations spécifiques non assurées par les fonctionnaires de l'établissement ou des partenaires extérieurs", soit de "fonctions complémentaires de soutien à la prise en charge des détenues" ; qu'il est spécifié que bien que les sœurs soient dans l'exécution des tâches qui leur sont confiées placées sous le contrôle de l'administration pénitentiaire "il n'existe aucun lien contractuel entre chacune d'elles et l'administration" ; qu'il est prévu que les sœurs "assurent par elles-mêmes leur couverture sociale" ; que cependant, l'administration prend à sa charge "le logement des sœurs, les charges d'eau, d'électricité et de chauffage" et que la rémunération des tâches qui leur sont confiées est assurée par le versement à la Supérieure de la congrégation, "d'une indemnité globale équivalente, pour chaque sœur, à un traitement correspondant à l'indice brut, 226, augmenté des indemnités de résidence, de sujétion et de chaussures" ; Considérant, en premier lieu, qu'en décidant de conclure cette convention, le ministre s'est borné à prévoir les conditions de rémunération du concours apporté au fonctionnement du service public pénitentiaire par les membres d'une congrégation, dont il n'est pas contesté qu'elle a une existence légale ; qu'eu égard à l'objet de cette rémunération, il ne saurait valablement être soutenu qu'il y aurait méconnaissance des dispositions de l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 en vertu desquelles "la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte".  

Arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme Lautsi contre Italie (18/03/2011). La présence de crucifix dans les classes ne pose pas de problème. Ne saurait poser de problème, n'est-ce pas : "Il n'y a pas devant la Cour d'éléments attestant l'éventuelle influence que l'exposition sur des murs de salles de classe d'un symbole religieux pourrait avoir sur les élèves ; on ne saurait donc raisonnablement affirmer qu'elle a ou non un effet sur de jeunes personnes, dont les convictions ne sont pas encore fixées". (§66); "De plus, le crucifix apposé sur un mur est un symbole essentiellement passif, et cet aspect a de l'importance aux yeux de la Cour, eu égard en particulier au principe de neutralité. On ne saurait notamment lui attribuer une influence sur les élèves comparable à celle que peut avoir un discours didactique ou la participation à des activités religieuses" (§72).

Arrêt CEDH Eweida contre Royaume-Uni (15/01/2013). British Airways interdit à une salariée de porter une croix discrète, la Cour européenne s'en attendrit, évidemment : "On one side of the scales was Ms Eweida’s desire to manifest her religious belief. As previously noted, this is a fundamental right: because a healthy democratic society needs to tolerate and sustain pluralism and diversity; but also because of the value to an individual who has made religion a central tenet of his or her life to be able to communicate that belief to others. On the other side of the scales was the employer’s wish to project a certain corporate image. The Court considers that, while this aim was undoubtedly legitimate, the domestic courts accorded it too much weight. Ms Eweida’s cross was discreet and cannot have detracted from her professional appearance. There was no evidence that the wearing of other, previously authorised, items of religious clothing, such as turbans and hijabs, by other employees, had any negative impact on British Airways’ brand or image". (§94).  

MAIS 

Arrêt CEDH Dahlab contre Suisse (15/02/2001). Une institutrice qui porte un voile peut heurter le cerveau des petites têtes blondes : "La Cour admet qu’il est bien difficile d’apprécier l’impact qu’un signe extérieur fort tel que le port du foulard peut avoir sur la liberté de conscience et de religion d’enfants en bas âge. En effet, la requérante a enseigné dans une classe d’enfants entre quatre et huit ans et donc d’élèves se trouvant dans un âge où ils se posent beaucoup de questions tout en étant plus facilement influençables que d’autres élèves se trouvant dans un âge plus avancé. Comment dès lors pourrait-on dans ces circonstances dénier de prime abord tout effet prosélytique que peut avoir le port du foulard dès lors qu’il semble être imposé aux femmes par une prescription coranique qui, comme le constate le Tribunal fédéral, est difficilement conciliable avec le principe d’égalité des sexes. Aussi, semble-t-il difficile de concilier le port du foulard islamique avec le message de tolérance, de respect d’autrui et surtout d’égalité et de non-discrimination que dans une démocratie tout enseignant doit transmettre à ses élèves. Partant, en mettant en balance le droit de l’instituteur de manifester sa religion et la protection de l’élève à travers la sauvegarde de la paix religieuse, la Cour estime que dans les circonstances données et vu surtout le bas âge des enfants dont la requérante avait la charge en tant que représentante de l’Etat, les autorités genevoises n’ont pas outrepassé leur marge d’appréciation et que donc la mesure qu’elles ont prise n’était pas déraisonnable".

Arrêt CEDH Leyla Sahin contre Turquie (10/11/2005). Une étudiante ne peut pas porter de voile à l'université. C'est comme ça : "La Cour note que le système constitutionnel turc met l’accent sur la protection des droits des femmes. L’égalité entre les sexes, reconnue par la Cour européenne comme l’un des principes essentiels sous-jacents à la Convention et un objectif des Etats membres du Conseil de l’Europe, a également été considérée par la Cour constitutionnelle turque comme un principe implicitement contenu dans les valeurs inspirant la Constitution (...) (...) En outre, à l’instar des juges constitutionnels (...), la Cour estime que, lorsque l’on aborde la question du foulard islamique dans le contexte turc, on ne saurait faire abstraction de l’impact que peut avoir le port de ce symbole, présenté ou perçu comme une obligation religieuse contraignante, sur ceux qui ne l’arborent pas. Entrent en jeu notamment, comme elle l’a déjà soulignéla protection des « droits et libertés d’autrui » et le « maintien de l’ordre public » dans un pays où la majorité de la population, manifestant un attachement profond aux droits des femmes et à un mode de vie laïque, adhère à la religion musulmane. Une limitation en la matière peut donc passer pour répondre à un « besoin social impérieux » tendant à atteindre ces deux buts légitimes, d’autant plus que, comme l’indiquent les juridictions turques (...), ce symbole religieux avait acquis au cours des dernières années en Turquie une portée politique. (...) La Cour ne perd pas de vue qu’il existe en Turquie des mouvements politiques extrémistes qui s’efforcent d’imposer à la société tout entière leurs symboles religieux et leur conception de la société, fondée sur des règles religieuses (...) Elle rappelle avoir déjà dit que chaque Etat contractant peut, en conformité avec les dispositions de la Convention, prendre position contre de tels mouvements politiques en fonction de son expérience historique. La réglementation litigieuse se situe donc dans un tel contexte et elle constitue une mesure destinée à atteindre les buts légitimes énoncés ci-dessus et à protéger ainsi le pluralisme dans un établissement universitaire " (§115).

Arrêt CEDH Kervanci contre France (04/12/2008). Une lycéenne ne peut pas non plus porter de voile, la laïcité, que veux-tu  : "la Cour estime que la conclusion des autorités nationales selon laquelle le port d’un voile, tel le foulard islamique, n’est pas compatible avec la pratique du sport pour des raisons de sécurité ou d’hygiène, n’est pas déraisonnable" (§73).

Arrêt CEDH S.A.S contre France (01/07/2014). Le voile intégral, a fortiori, bouhhh : "La Cour prend en compte le fait que l’État défendeur considère que le visage joue un rôle important dans l’interaction sociale. Elle peut comprendre le point de vue selon lequel les personnes qui se trouvent dans les lieux ouverts à tous souhaitent que ne s’y développent pas des pratiques ou des attitudes mettant fondamentalement en cause la possibilité de relations interpersonnelles ouvertes qui, en vertu d’un consensus établi, est un élément indispensable à la vie collective au sein de la société considérée. La Cour peut donc admettre que la clôture qu’oppose aux autres le voile cachant le visage soit perçue par l’État défendeur comme portant atteinte au droit d’autrui d’évoluer dans un espace de sociabilité facilitant la vie ensemble" (§122).

Cour de cassation (25/06/2014). La cerise sur le gâteau : "Attendu qu’ayant relevé que le règlement intérieur de l’association Baby Loup, tel qu’amendé en 2003, disposait que « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche », la cour d’appel a pu en déduire, appréciant de manière concrète les conditions de fonctionnement d’une association de dimension réduite, employant seulement dix huit salariés, qui étaient ou pouvaient être en relation directe avec les enfants et leurs parents, que la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée par le règlement intérieur ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches accomplies par les salariés de l’association et proportionnée au but recherché". 

Résultat : les femmes voilées privées de plage à Wissous. France, patrie des droits de l'Homme...