La bêtise l'a emporté. Les Suisses ont interdit la construction des nouveaux minarets. Les minarets, des baïonnettes, comme on le sait. Ils avaient peur. La paranoïa, encore une fois. Comme on le sait, les mosquées inondent la Suisse; il fallait donc s'inquiéter, la routine. Quoique. Tous les politiques sérieux, les représentants religieux, les hommes sensés avaient demandé aux électeurs de ne pas humilier la Suisse.
Evidemment, soumettre à référendum des questions relatives aux libertés fondamentales est, en soi, incompréhensible mais bon; la Suisse, voyons, celle qui proposait jadis d'instituer une Cour mondiale des droits de l'Homme. Naguère. On le sait, les pathologies ne se soignent en Europe qu'en fessant les musulmans, des proies faciles; ça tombe bien, les musulmans s'énervent un temps et oublient vite. C'est connu, un musulman doit toujours être conciliant; "j'en ai marre, je proteste, je hurle et...", "chut ! dis pas ça, excuse-toi, tu provoques, tu fais peur, sıs". Qu'ils touchent donc aux églises et aux synagogues, le Conseil de sécurité se serait déjà réuni en urgence, "arrête d'exagérer, t'es antisémite hein, avoue-le !"...
Mais la tradition veut tout de même que l'on marmonne des choses lorsque l'on viole les droits de l'Homme; "un scandale" a lâché notre Kouchner national; "intolérance" a même déclaré le Vatican; "anachronique" a déclaré le ministre turc de la culture, "d'ailleurs venez chez nous, on va vous apprendre la tolérance". Les théologiens de l'UMP en étaient, entre-temps, à convaincre les Français de l'inanité des minarets dans le dogme islamique... De son côté, le Président de la Cour européenne des droits de l'Homme, Jean-Paul Costa, celui qui, lors de la Commission Stasi donnait des astuces aux sages pour interdire le voile, n'a pas pu se retenir : "alors, quid de ce référendum sur le plan des droits de l'Homme ?", "oulala, c'est très compliqué tu sais, hein, intérêt à agir, épuisement des voies de recours internes, etc., allez, allez...". Complexe. Evidemment. Simple pourtant, limpide : violation de l'article 9.
"Arrête de dire ça, les minarets ne sont pas une exigence de la Loi islamique, pfff, avoue que vous faites exprès de les ériger pour nous provoquer !","mais on s'en fout de vous, on ne vous a même pas calculés, arrêtez de délirer !", "j'ai peur moi, regarde je tremble","bah consulte"... Une vieille dame qui venait de voter oui à l'interdiction avait déjà préparé dans sa petite tête, le discours qu'elle allait tenir aux journalistes si on l'interrogeait à la sortie : "bah quoi, et chez eux, les églises sont interdites et toc, je suis intelligente hein ?", "oui oui mémé". Il faudrait donc s'abaisser au niveau de ces pays. La réciprocité, en somme, dans la violation des droits de l'Homme ! D'ailleurs, les extrémistes de tout bord ont commencé à vomir; c'est connu, la banalisation brise les laisses; elle éperonne l'intolérant qui demeure en nous et qui est prêt à se déchaîner à la première occasion.
Evidemment le Premier ministre turc se devait de donner son avis; un islamiste-terroriste-fasciste comme on le sait. D'ailleurs, l'on apprend que les autorités helvétiques avaient supplié la diplomatie turque de tout faire pour l'anesthésier; motif : sa colère est proverbiale. Il ne fallait surtout pas brusquer les électeurs. Maintenant que c'est fait, Erdogan peut tempêter : "il y a des demeurés qui disent que les minarets sont l'étendard des islamistes, regardez moi ça franchement, il faut être con pour réfléchir ainsi !".
En Turquie, on ne dépense pas des sommes faramineuses pour des référendums lèse-liberté; la justice joue déjà ce rôle : une Cour constitutionnelle remplie d'incompétents, un Conseil d'Etat qui estime que l'égalisation des conditions d'accès à l'université entre les élèves des lycées normaux et ceux des lycées religieux est précisément contraire à l'égalité (sic !), une Cour de cassation qui n'en finit pas d'élargir la notion de liberté d'expression lorsqu'il s'agit d'insulter les politiciens kurdes. L'esprit turc, être malin. Violer les libertés à l'oeil.
Jadis, notre Prophète l'avait dit : "quiconque nuit à un chrétien ou à un juif sera mon ennemi le jour du Jugement et le paiera". Les Suisses, dit-on, seraient gênés, ils ont honte. Nous autres musulmans, nous sommes fiers. Fiers d'être les suiveurs d'un homme qui a dit cela il y a 1400 ans. Notre nourriture est autre, elhamdulillah...