samedi 30 août 2008
Du bon usage de Mustafa Kemal
mercredi 27 août 2008
Clopin-clopant
Une de ces séries que l'on suit fièvreusement. Mon père la détestait; des séries où l'on affichait crânement des "rapprochements" corporels ne pouvaient que le rebuter. La vieille école. Non pas qu'il fût obtus mais la simple pudeur. C'est comme ça. L'influence d'une version bridée de la morale. Ca me semblait bizarre d'ailleurs car en plus d'être musulman, "modéré" dit-on aujourd'hui, il avait tout de même du sang ossète; et les Ossètes n'ont jamais eu la prétention d'être des adeptes de la sacristie; l'absence de la phallocratie les a conduits à la modération tous azimuts. C'est connu, le degré de piété augmente à mesure que gonfle l'animosité envers la féminité et son ressort principal, le risque d'embrasement.
Les Turcs sont plus libres, sur le plan des moeurs, que les Arabes. La série n'est donc pas aussi étrangement accueillie; certes, les scènes de tendresse sont mesurées, un torse nu par-ci, une chemise de nuit par-là, on est loin de la "déraison" des séries latino-américaines. De la tendresse; la scène d'un lit un peu froissé, des têtes échevelées, etc. Le "suggéré". Mais jamais d'ébats. La scène de Ivo di Carlo enlacé à Milagros fait toujours rougir la ménagère. Depuis, on a introduit le système de la signalétique "interdit aux moins de ...".
Les imprécations s'épanchent : alors que les téléspectateurs se reposaient les doigts de pied en éventail après une rude journée (de travail pour les hommes et de palabre pour les femmes), retentit le bruit des muftis : "c'est de la fange, misérables, fermez-moi cette pouffiasserie, contentez-vous de vos partenaires. Parpaillots !". Un ponte religieux d'Arabie Saoudite a même décrété que ce genre de visions ne seyait pas au mode vie imposé par ALLAH et Son Prophète.
Les sociétés musulmanes sont, en général, raides du fait même de la gravité qu'impose la religion (d'où le vagissement des laïcistes en Turquie) et il est difficile de se construire une personnalité; de celle que l'on retrouve ailleurs : épanouie, stable, apaisée. Je connais la rigueur : mon père voulait absolument que l'on observe les règles de conduite qu'impose une bonne éducation ossète : déférence pour les anciens, étiquette en guipure, l'art de prendre la parole et surtout de la rendre, l'art de présenter un verre d'eau, l'art de marcher, etc. Un mode nécessaire, d'accord mais parfois étouffant. Heureusement, ces rituels ont été purgés. Tous les gestes mentionnés perdurent mais on est à la coule. Et mon père n'est plus. Et les Sages deviennent eux-mêmes de plus en plus libéraux, "et puis flûte, on n'a qu'une vie !".
Bref, un moment de plaisir devient un combat de fatwas. Le grand blond fait fantasmer; techniquement, il est difficile de se partager les chefs-d'oeuvre de la nature. Les femmes seraient en transe, à en croire les chroniqueurs judiciaires, les demandes de divorce explosent, la faute à Kivanç Tatlituğ, la faute à Songül Öden... mais les naissances aussi, on se bouscule à l'état civil, "Noor et Mohanned, note, note...". C'est vrai que le fait de divorcer pour une "image", une "icône", un type trop éloigné des canons de l'arabité désole les religieux. Ils savent eux, le désir est le père de tout dérèglement. Et cela n'entre pas dans le contrat de société : Sourate 24, versets 30-31 : "Dis aux croyants de baisser leurs regards et de garder leur chasteté (...) Et dis aux croyantes de baisser leurs regards, de garder leur chasteté (...)".
"Les gueuses, elles s'enflamment si vite... c'est vrai qu'il est pas mal, hein ?" peut-on se bercer, "elles ne font que se rinçer !" peut-on se berner. En tout cas, elles font jaser le monde entier, et ce n'est pas si mal dans un domaine où l'on s'y attend le moins. Les regards se mêlent, torves ou de merlan frit.
"L'oeil n'a qu'une quantité d'éblouissement possible" nous apprend Victor Hugo. La satiété n'existe pas dans ces contrées. Le "soft" déclenche monitions. Mais, c'est comme ça, ce n'est pas sans rime ni raison dans leur weltanschaaung, gardons-nous d'exporter nos indignations. "D'abord, à quoi ça sert les mots quand on est fixé ? A s'engueuler et puis c'est tout" (L-F Céline).
dimanche 24 août 2008
Le robinet d'eau tiède
mercredi 20 août 2008
Will you kindly leave ?
Il était modéré, nous dit-on. Dans la foi, s'entend. Les Pakistanais le sont en général. "Ne vous inquiétez pas, amis Américains, il boit de l'alcool, il ne prie pas, il voue un culte à Atatürk, donc fréquentable; le type idéal pour lutter contre l'extrémisme...", "Ah ouais, mais comment il a fait pour passer à travers les mailles de Zia ul-Haq ?", "En se faisant petit, voyons, il n'a même pas joué l'hypocrite, tu t'imagines, une sincérité et une audace devant l'islamiste Zia !".
Les Américains le soutenaient. "Il se bat bien hein, qu'est-ce t'en penses ?". Les Talibans ont le coeur à la danse : ses efforts n'étaient certes pas suffisants, il s'amollissait dans la lutte contre eux, d'accord mais il les détestait. Ca suffisait. Tiens, on apprend que ces terroristes ont martyrisé 10 soldats français, des éphèbes dont le poil de barbe n'a pas encore correctement poussé... Que Dieu les absolve.
Bien sûr les Américains chérissent souvent, pardonnent toujours les incartades de leurs protégés : il avait décrété l'état d'urgence pour mieux se faire réélire; il avait même remplacé le désormais célèbre Chaudhry. "Tu ne sais même pas lire correctement la Constitution, dégage, bovin". Erdogan a dû être jaloux : "eh les gars, et nous, on a ce droit constituitionnel ? Allez on va débarquer tous ces kémalistes !". Calme, calme. Le juge constitutionnel Paksüt, dont nous avons raconté si souvent les écarts, n'avait même pas daigné baisser le menton pour répondre aux questions des journalistes. "De quoi avez-vous parlé avec le Général, Monsieur le Juge ?", "Allez, allez, ne fantasmez pas".
Certains journalistes l'invitent en Turquie. Même si il a bien négocié son départ, il court toujours un risque. Les hommes sont ingrats, Nawaz Sharif le sait mieux que quiconque. Et puis, il parle le turc couramment, et c'est un kémaliste, il nous faut des renforts, et il soutient l'équipe de Besiktas, et surtout c'est un ancien putschiste. La Turquie en tire une fierté, c'est le seul pays où les généraux turbulents se portent bien. Un de plus... Espérons qu'Omar al-Bachir, qui aime bien fouler le sol turc apparemment, n'en vienne pas à élire exil dans ce pays. "N'en fais pas une jaunisse, on a besoin du soutien de tout le monde pour avoir ce siège au Conseil de sécurité ! C'est important ! En plus, il veut se refaire une virginité, regarde, il entame des pourparlers avec ses opposants politiques dans son pays". "Bon d'accooord". D'ailleurs al-Bachir jette son jus : le crépitement des "flashes" le rend heureux, il sert la main du Président Gül deux fois pour satisfaire tout le monde. Le Turc, raide comme la justice, arbore un rire jaune.
On ne sait pas encore s'il faut faire la noce ou broyer du noir. Le Pakistan détient l'arme atomique et on ne sait jamais. Et il est en froid avec l'Inde à cause du Cachemire. La Chine n'a jamais été non plus désintéressée par la question. Et si l'on prête l'oreille à la légende "tenace", le tombeau de Jésus y serait... Ah Moucharraf, le fossoyeur de la fragile accalmie. Allez va ! on a bien compris que tu n'y es pour rien dans ton départ; les conclaves se font ailleurs...
samedi 16 août 2008
Séidisme
Et ils furent ravis. Il faut dire que le piège était facile; les photos de l'Eternel sont clouées partout. Khomeiny n'est pas en reste; il trône là-bas. Les Iraniens sont iconodoules. Mais pas idolâtres. Les diplomates turcs n'avaient même pas osé préciser cette "spécificité" aux autorités saoudiennes lorsque Abdallah devait séjourner en Turquie. "Hein ? Le Roi, mettre son fessier en l'air pour déposer des fleurs sur quoi ? Je ne saisis pas ! Il ne visite même pas la tombe de son Prophète qui est sous son nez ! Il a déjà du mal à laver la Kaaba, alors, hein, en plus, il est vieux, allez, allez". Et les Turcs l'avaient accueilli sans broncher. Là, ils piquent une colère. Respect pour Sa Majesté ! L'inconscient...
Les "controverses sous-intellectuelles" fleurissent souvent, ça n'échappe à personne. C'est la maladie du scrupule à l'envers. Une occasion de se taire. "Non, je braille, tiens, bien fait et je pleure. Atatürk, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font". Les Persans, nous dit Louis Massignon, voient dans les larmes, le sang de l'âme, sang qu'elle perd quand "elle sent que le divin visiteur l'abandonne". Sans autre commentaire.
Erdogan est un chariatiste, il n'a pas été foutu de jeter le Perse aux pieds de Mustafa Kemal. "Mais, i veut pas, i veut pas ! Lâchez-le et respectez ses convictions". "Cornichon, toi aussi, t'es son lieutenant, dis-le !". Un journaliste de renom avait supplié le Premier Ministre de bien vouloir tenir un verre de champagne à la main pour donner un message à la frange laïque de la population. Merci pour les "laïques" qui sont réduits à des consommateurs d'alccol. "Mais, putain, fais chier, à la fin, j'bois pas d'alcool" . "On s'en fout, tiens juste le verre, ça suffit".
Voilà donc où nous en sommes. Des susceptibilités qui ne font même pas cent balles; il faut dire que Erdogan et comparses "puent tout exprès" pour les laïcistes. Rien à espérer.
mardi 12 août 2008
Saakachvili et son joli coup de pied dans la fourmilière
samedi 9 août 2008
Et la trêve cessa...
mercredi 6 août 2008
Vérité indivise
Voilà que les autorités rwandaises publient un rapport qui accable certaines personnalités françaises ; "les gens se vengent des services qu'on leur rend" disent les uns, "un homme, ce n'est rien après tout que de la pourriture en suspens" rétorquent les autres, citant le même auteur. Les Français ne sont pas des saints; notre patrie a seulement l'honneur de se voir qualifier "terre des droits de l'Homme". C'est d'jà ça. Les diplomates sont appelés à la rescousse : "allez, dites-leur de se calmer et Bruguière fera profil bas, la vérité n'a pas besoin d'être honorée dans ces circonstances". Vas-y, vas-y. Les Hollandais nous lancent des bourrades :"t'inquiètes, ça s'oubliera, fais-moi confiance, j'en connais le sentier...". Entre-temps : "et vous, les Turcs, amendez-vous, on n'a pas oublié, coquins, reconnaissez !".
Il est légitime, parfois requis, de hausser le ton; mais dans la cohérence. Les causes ne se choisissent pas, elles se défendent toutes. Pas pour la fanfaronnade mais pour la vérité. Les éclipses dans ce domaine sont toujours éclatantes : passer sous silence ses égarements et faire la chantepleure pour ceux des autres, c'est, en somme, distribuer les verges pour se faire fouetter. Et cela, que je sache, n'est pas un mérite. Balayer devant sa porte en est assurément un. A vouloir mettre son pied dans tous les souliers, on plaide comme une savate...