La saison des anathèmes, des remontrances, des serments de toutes sortes est ouverte : Israël veut en découdre, les "durs" de l'autre bord en sont aux "ALLAH ekber" (ALLAH est grand), les désolations se compartimentent, les chagrins sont divisibles : les uns pleurent les Israëliens victimes du Hamas, d'autres, plus nombreux, gémissent pour les Palestiniens morts. Même en France, où l'on persiste à se considérer comme une nation une et indivisible, les clans pleurent les leurs sans se soucier, du moins en apparence, de la peine des autres.
Dans ces contrées, la mort d'un membre de la famille suscite ni interrogation ni attardement. La Patrie est tout; tout enfant, un martyr en devenir. La structure mentale et la représentation sociétale sont ainsi, la vie n'a point d'existence propre, elle est l'accessoire d'un idéal.
La tempète était prévisible, l'entêtement et l'aveuglement ont fait le reste. Mais l'injustice à l'égard des Palestiniens civils, tués lors des bombardements, est tenaillante; on est humain, au fond, il faut bien ressentir des choses. On se désole tout autant pour les Israéliens innocents, victimes de roquettes. D'ailleurs, dépouillé de toute affiliation religieuse, la simple logique nous impose cette posture; même Tayyip Erdogan, qui a ouvert la bouche sans réfléchir, en aurait été convaincu. Que fait la Turquie en Iraq du Nord, de temps en temps ? Eh bien, elle lutte contre des terroristes. Que dit Israël ? "Je lutte contre des terroristes". A tort ou à raison, c'est sa position officielle; on se retrouve dans une configuration semblable.
Evidemment, personne n'a raison, et malheureusement personne n'a tort. Que des convaincus. Mais faire comme si Israël avait systématiquement raison devient, à la fin, une pathologie. Le réalisme impose une chose très claire : bannir le terme de "résistance". Qu'on le veuille ou non, l'Etat est là; pour l'éternité, puissant. Injustement, peut-être. Mais quand la "cause" des uns devient théorique, il vaut mieux s'investir à fond dans les négociations. Embarqué sur le même navire, il est temps de rêver au même rivage. La normalité, coûte que coûte.