vendredi 25 avril 2008

Conservatisme et opposition à la polygamie

Le propriétaire d'une chaîne de magasins spécialisés dans la vente de vêtements islamiques a reconnu qu'il vivait, heureux, avec ses trois femmes et sa marmaille. Le miracle du mariage religieux. Le Coran ne permet-il pas la polygamie ? Cette autorisation est suivie par pas mal de gens notamment au sud-est de la Turquie; résultat: on interdit le mariage religieux pour éviter les abus. Nombreuses sont les femmes forcées d'épouser de vieux croûtons; victimes des règlements obscurs des hommes. A l'ouest, rien de différent, mais ils ne passent pas par l'imam; ils se la coulent donc douce; il n'est pas interdit d'avoir des maîtresses.
"Exploitation" des femmes dans les deux cas; quand elle a un fondement religieux, c'est insupportable. En réalité, personne ne lutte pour ces femmes; on lutte contre la religion, elles tombent juste bien à propos. Encore une fois victimes.
L'interdiction des mariages multiples dans un monde qui commence à se dérègler peut ne plus se justifier. La fidélité n'existe presque plus. Les couples sont eux-mêmes demandeurs pour tenter des "expériences". Comment, dès lors, condamner la polygamie ou la polyandrie ? Comment éradiquer le "poly" ? Il est inscrit dans les moeurs.
Les enfants naturels et les enfants légitimes ont les mêmes droits; c'est du juridique. Les enfants adultérins ne sont plus les malvenus; l'adultère ne relève plus du pénal. Double standard dans le libertinage ? Entretenir en bonne et due forme une deuxième voire une troisième famille, c'est répréhensible. Vivre en catimini avec plusieurs, c'est répréhensible aussi. Dans les pays musulmans, le premier cas l'est juridiquement, le second moralement; comme dans les pays occidentaux. Personne ne s'est retrouvé sous les verrous du chef d' incartade sentimentale. Le non-droit appelle un respect de la vie privée. Si Mitterrand avait regroupé ces deux familles dans une même maison, il aurait été fustigé. Vivre séparemment l'a sauvé de l'opprobre; mieux: il a fait pleurer les chaumières.
Je suis contre la polygamie. Moralement. Juridiquement, la question ne se pose pas; la réalité des faits sait se débrouiller pour contourner les règles de droit. Interdire juridiquement n'a jamais été mon dada. Je préfère l'explication, la prise de conscience. Contre un droit à la Potemkine; dans une logique parfaite mais éhontément ignorée. Sur le plan théologal, j'ai la faiblesse de penser que le verset en question est, de facto, abrogé ou inapplicable; la protection de la veuve et de l'orphelin n'est plus à l'air du temps. Même si elle l'est, le droit positif n'autorise plus cette méthode. Les hommes "sincères" doivent trouver d'autres moyens; demokrasilerde çagre tükenmez...
L'indignation s'arrête aux portes de la sincérité et de la cohérence. Le doyen Carbonnier disait: "Les savants d'il y a cent ans se demandaient d’où la famille venait ; ceux d'aujourd'hui se demandent plutôt ou elle va." Si des vierges restent effarouchées, il est pressant de les déniaiser.

mercredi 23 avril 2008

Effronterie

Une journaliste de renom avait affirmé que lors du contentieux constitutionnel relatif à l'élection du Président de la République turque, l'armée avait fait pression sur les juges pour qu'ils lisent, exceptionnellement, le code militaire à la place de la Constitution, et que ces derniers avaient rétorqué: "mais comment pourrions-nous expliquer cette décision à nos petits-enfants ?" S'expliquer devant l'histoire aurait suffi, mais bon passons. Un registre étranger.
L'amiral et la présidente de la Cour constitutionnelle ont démenti cette nouvelle. Pas immédiatement. Une semaine après. Très rare pour l'état-major. L'amiral en retraite a même feint la rigolade: "Un coup d'Etat ne se fait pas tambour battant, il y a un code à respecter". Alors que les journalistes s'interrogeaient seulement sur cette pression, l'officier leur a donné des leçons de "putschment". Personne ne s'en est offusqué; les militaires turques sont rodés dans ce domaine.
Il fut un temps où tout le monde (le monde de l'extérieur s'entend) se demandait comment faisait l'ancien putschiste Kenan Evren ("Chef de l'Etat" de 1980 à 1982 et "Président de la République" de 1982 à 1989) pour se promener tranquillement dans les rues à cet âge (plus de 90 ans) mais surtout avec ce passé. Respecté en plus; titre d'ancien président oblige. C'est que les militaires ne craignent jamais rien en Turquie. Les lois sont suspendues lors de leur passage. On les respecte. Beaucoup à mon goût.
Lorsque la justice a saisi le disque dur de l'ancien chef d'état-major de la marine qui recelait, nous dit-on, des énormités, le juge s'en est presque excusé... Les journalistes font tout pour oublier dans ces cas-là. Certains s'offusquent, se dressent, contestent mais rien ne change. L'état-major se mure dans le silence. C'est l'avantage, au moins, on ne les entend pas. Ils le savent: si le général en chef Yasar Büyükanit prend la parole, il a peur que ça dérape. Alors que les journalistes turcs sont polis. C'est connu.
Les relents stratocratiques envahissent le nez de tous les démocrates; certains républicains s'en émeuvent... Mais l'arôme ne pue pas ? Changez de nez !

lundi 21 avril 2008

Un évêque-président

Enfin, on a un nouveau Président de la République-évêque. Au Paraguay; il s'appelle Mgr Fernando Lugo. Un "évêque des pauvres" nous dit-on, sans oser relever qu'il devrait s'agir là d'un pléonasme.
On a désormais deux évêques-présidents: lui et son ex-supérieur hiérarchique, le Pape. Deux homologues. Mais la différence est majeure: l'un gouverne des âmes, l'autre des êtres humains; l'un est à la tête d'un Palais, l'autre à la tête d'un Etat. Les préoccupations diffèrent logiquement: l'un jongle avec des calculs économiques, financiers, diplomatiques, etc., l'autre rêve, sans plus, d'un monde meilleur. Deux hommes de foi. D'un côté, un serviteur de Dieu, de l'autre un Serviteur des serviteurs de Dieu. Le second a toujours la primauté, c'est comme ça.
Son excellente Eminence ou éminente Excellence (comme on veut) promet tout ce que l'on promet depuis déjà des siècles: du pain, des terres, un confort, etc. Un bouleversement n'est pas attendu mais d'aucuns le voient comme un communiste, un affidé de Morales ou de Chavez. Un certain Makarios III qui régnait sur Chypre jadis avait été pris pour un complice de Castro. Drôle de postures pour des ecclésiastiques.
Au passage, réitérons notre proposition pour le Cardinal Sfeir; le Liban vous attend.
On lui souhaite sincèrement de recevoir une collaboration d'En-Haut; il est temps de montrer que le gouvernement d'un évêque ne saurait être semblable à celui d'un politicien ordinaire. Le Saint-Esprit ou l'ange Gabriel devra sortir des conclaves. La réalité est ailleurs... Ca fait bien longtemps que les cardinaux savent se débrouiller entre eux.

vendredi 18 avril 2008

Définition juridique de la douleur dans le cadre d'une peine de mort

In abstacto, je suis contre la peine de mort; mais j'essaie de comprendre l'émotion de ceux qui ont souffert du fait d'un crime puni de la peine capitale. Rien ne m'autorise à critiquer leur désir de vengeance extrême. Le désir de proportionnalité est bien connu en matière de vengeance; lorsque l'on tue, la famille du défunt réclame la mort, lorsque l'on viole un enfant, tout le monde réclame la mise à mort. L'atrocité, lorsqu'elle est ressentie comme telle par la quasi-majorité, stimule l'inconscience et dans le monde de l'inconscience, par définition, les verrous sautent. Il faut vraiment vouloir pour que la raison revienne et prenne le dessus. Et ne pas le vouloir n'est pas humainement incompréhensible.
La mort, en soi, n'est pas un châtiment cruel; on ne souffrerait pas puisque l'on ne la subirait pas. Ce que disait jadis Epicure. C'est la position de la Cour suprême des Etats-Unis. La Constitution américaine prohibe les châtiments cruels (8è amendement: "Excessive bail shall not be required, nor excessive fines imposed, nor cruel and inusual punishments inflicted"). Il a donc fallu "négocier" sur les modalités d'exécution; après les électrocutions, pendaisons, pelotons d'exécution voire les "chambres à gaz", on avait trouvé une nouvelle méthode: l'injection létale. On comprend qu'elle nécessite trois phases: l'endormissement, la paralysie et l'arrêt cardiaque. Ni vu ni ressenti; on meurt inconscient.
Bien évidemment, les Etats-Uniens aimant chicaner, on s'est retrouvé devant les "Sages" pour règler le problème. L'injection est-elle un châtiment cruel ? A priori non puisque la Faucheuse ne s'empare, en somme, que d'un épi bringuebalant. Mais on s'est rendu compte que cette méthode avait des travers: on peut passer, par erreur technique, directement à la deuxième phase; résultat: le condamné souffre atrocement. La Mort droit dans les yeux. Les droits-de-l'hommistes s'en désolent car il s'agit bien d'un homme dont on parle. Du coup, on réfléchit. Les "9" se sont donc longuement interrogé et ont pondu un raisonnement implacable: certes la douleur provoquée est un châtiment cruel mais le risque de douleur n'est pas contraire à la Constitution. Autrement dit, tant que l'intention n'est pas de provoquer une douleur, l'injection n'est pas un châtiment cruel; le risque de provoquer une douleur, par exemple par accident ou "comme conséquence inévitable du processus menant à la mort" (je n'ai pas vraiment saisi le sens du mot "processus") n'est pas juridiquement digne d'être retenu. Une petite dose de gêne n'est rien pour le grand voyage.
Lorsque l'on chicane, là-haut on pinaille. Mais c'est le droit. Espérons que John Paul Stevens aura encore quelques années à passer là-bas pour convaincre enfin ses collègues que la peine de mort est anachronique et anticonstitutionnelle.

mardi 15 avril 2008

Baiser de Judas

Je ne fais pas trop cas des propos populistes qui, certes caressent notre prédisposition à l'indignation, mais restent toujours suspicieux. Parfois, je cède. Lors d'une cérémonie célébrant la libération de la ville de Sanliurfa (au sud-est de la Turquie) des forces françaises en 1920, le gouverneur militaire de la zone, un général, s'est senti mal à l'aise, entouré de quelques femmes voilées dans la "tribune" réservée au protocole. L'ordre a donc été donné de les refouler à l'arrière ou de les inciter à ôter leur voile. Il s'agit du voile de Sanliurfa et non du "turban" stambouliote; précision importante car l'un représenterait la femme anatolienne pieuse et donc respectable et l'autre la lutte idéologique contre le régime kémaliste et donc insupportable.
Ce genre de "bizarrerie" ne choque plus trop en Turquie; lorsque les militaires parlent, on courbe le corps. Presque insignifiant. Ils ont réussi à rendre anodine la violation continue d'une liberté individuelle. On avait eu droit à des scènes de théâtre lorsque le Président Gül avait pris ses fonctions; son aide de camp, bon militaire, se félicitait d'avoir réussi à ne pas être filmé une seule fois avec la femme du Président, voilée. Une gloriole qui mérite sans doute une promotion dans leur système d'avancement où il n'est pas nécessaire de casser trois pattes à un canard pour prendre du galon (on en est toujours au système de fiche à la Combes). Si l'obligation protocolaire exigeait un rapprochement entre lui et la "First Lady", la solution coulait de source: se présenter en civil; l'alliance de l'uniforme et du voile, jamais ! On avait aperçu aussi le gouverneur militaire d'Ankara bouder la suite protocolaire qui se met toujours en place lorsque le Président de la République va à l'étranger. Cérémonie pompeuse mais c'est comme ça. Notre gouverneur faisait tout pour ne pas serrer la main de Mme Gül. Il en était fier.
Chez nous, on appelle ça: une pathologie. Voire une connerie. J'en viens au populisme: un journaliste classé à l'extrême-droite religieuse (il écrit dans Vakit, un journal "chariatiste") dit vrai lorsqu'il relève cette absurdité implacable: on le sait, chez les Turcs, les soldats morts pour la Patrie sont des "martyrs" (terme éminemment religieux), même dans le jargon officiel (vive la laïcité !). Les sociologues et historiens ont relevé que les "martyrs" étaient tous d'extraction modeste (aucun fils de diplomate, politique, militaire, entrepreneur, etc.) et donc de familles où les "voilées" sont majoritaires. Or, lors des funérailles, les militaires sont les premiers à se jeter dans les bras des mères, soeurs, épouses (donc toutes voilées) pour les consoler, jurer vengeance, promettre la punition. Et le lendemain, les mêmes demandent à ces futures mères de martyrs de disparaître du décor.
Prendre les femmes du bon Dieu et du bon peuple pour des canards sauvages... Il est grand temps de "déposer du sublime" dans le futur.

samedi 12 avril 2008

Une justice injuste ? Un droit injuste ?

60 % des Turcs estiment que leur justice donne des décisions injustes. La première question qui me vient à l'esprit: comment un citoyen lambda qui ignore les dossiers soumis à cette justice peut-il "estimer" que les Cours jugent injustement ? Evidemment, il ne s'agit pas d'une analyse profonde de la casuistique, on s'en doute; un ressenti donc; une impression. La conviction nécessite un minimum d'approfondissement. L'apparence n'a-t-elle aucune importance ? Si si.
En réalité, le droit et la justice sont deux choses différentes. On parle d'un ministère de la Justice en France et en Turquie (Adalet). La "justice", un terme idoine ? Non. Il vaut mieux parler des "Cours de droit", d'un ministère de la Législation, je tremble tout le temps lorsque j'entame les escaliers d'un palais de "justice". Le terme m'effraie, sa signification est lourde; sacrée. L'exercice est impressionnant: rendre justice. Décider en fonction de ce qui est juste; une gageure, la justice n'est pas de ce monde. Allez osons: elle n'existe pas. Chacun sa justice; l'addition des justicettes ? Non. Un "truc" objectif, partagé par tout le monde mais qui échappe à l'identification. Une abstraction, quoi.
La justice, c'est le grand mot que chacun donne au balai de ses émotions. La passion conceptualisée. Le droit, c'est la conception humaine de la Justice.
Revenons à nos moutons: les "justiciables" se jettent donc, à leur corps défendant, aux mains de la "Justice"; mais ils savent que c'est une comédie. Que faire ? Rien dirons-nous. Par réalisme. Se fier au "Droit", construction rationnelle, influencée par la Justice, la Morale, l'Ethique, la Raison, le Bon sens mais frappée au coin de l'humanité. Les Turcs ne font pas confiance à l'Homme. Tout simplement. Comme tout le monde d'ailleurs. Les juges compris.
"Seriatin kestigi parmak acimaz" disent les Turcs, "le doigt coupé en application de la charia ne cause pas de douleur". Mais le mot "charia" déplait à certains. Il ne reste plus que la justice immanente pour les non au-delàtistes. Mais là encore, l'immanence peut renvoyer à l'irrationnalité; c'est vraiment délirant de vivre avec le sentiment que l'on ne sera jamais comblé en matière de justice. Je les plains...

jeudi 10 avril 2008

Une monarchie s'effondre

Au Népal, on aime la monarchie mais on déteste le Roi. Résultat: on dépose la monarchie. Les maoïstes ont eu raison de la vieille institution (quoique 240 ans est loin de constituer ce que nos 221 députés de la Restauration appelaient "l'antiquité de la possession" pour justifier un "trône placé dans une région inaccessible aux orages"; Charles X a dû décamper 4 mois plus tard ! ). Les dés ne sont pas lancés mais les jeux sont faits.
Le raisonnement peut sembler bizarre: on dépose les armes si vous déposez la monarchie. Le Roi Gyanendra, on aurait compris, personne ne le portait dans son coeur, mais l'institution est tellement chérie là-haut que l'on en perd son latin. Un monarque, c'est toujours bien quand le peuple est loin d'être une nation. Comme au Népal, plus d'une centaine d'ethnies et de "groupes linguistiques". Comble de l'incompréhension: les maoïstes veulent, par dessus le marché, instaurer un fédéralisme. Même le fédéralisme, c'est mieux quand il y a un monarque. Le Monarque dans un Etat fédéral, c'est comme une médaille: l'envers révèle la fiction d'une quasi-nation, le revers décèle un quasi-peuple. Un fédéralisme révèle toujours en creux une anormalité sociologique. Et la solution, c'est d'avoir un semblant d'unité; en général, incarné par une institution potiche. Les monarchies, au XXI è siècle, sont formidablement ciselées pour ce genre de "mission". Paradoxe: les maoïstes veulent un régime présidentiel...
Je fais toujours la moue lorsqu'une monarchie s'en va. A une époque de ma vie, j'étais monarchiste. Influence de Stéphane Bern. Un légitimiste, en plus. Du soyeux dans les institutions. Tel était le sens de la monarchie dans ma petite tête, comme si j'avais déjà compris qu'il valait mieux un propriétaire à vie que des corrompus en permanence. Les rois déchus m'ont toujours fait de la peine. Tout ce qui chute m'afflige. Peut-être un vieux réflexe d' aristocrate.

mardi 8 avril 2008

Le chien aboie, la torche passe


On relève les termes "échauffourée", "protestation", "indignation" lorsque l'on relate le parcours de la flamme olympique; on s'attendait plutôt à des applaudissements, des visages radieux, des bousculades festives. Apparemment, ça ne passe pas. Le monde d'en-bas ne suit pas le monde d'en-haut. Des Jeux Olympiques déconnectés de la ferveur populaire, à quoi ça rime ?

Le président du CIO a presque envie de décréter un boycott mais il s'excuse: "il n'y a pas d'élan en faveur d'un boycott général". Bien sûr, l'élan dont il est question n'est pas celui du peuple mondial, c'est celui des dirigeants. En réalité, on sent bien que tout échappe à tout le monde; plus personne ne pourra se dresser contre l'inéluctable. Le CIO envisage seulement d'arrêter la rigolade avec la torche. Un pied de nez des Chinois ! Il ne s'agit plus de parcours, on la transporte dans les bus. Peut-être que le Président Sarkozy ne participera pas à la cérémonie d'ouverture...A ma connaissance, un signal se donne à qui veut bien le comprendre. Une fois n'est pas coutume, je suis "royaliste" dans ce domaine. les brassards, c'est bien, le boycott, c'est mieux.

La Cour européenne qualifie souvent la presse de "chien de garde"; pour aboyer contre les excès de l'Etat. Les Chinois ne sont pas sourds ni muets ni même aveugles; ça doit être dur de vivre dans un régime si fermé, le simple fait de le concevoir m'exaspère. Ils ne savent rien de leur régime; certes, ils ont sans soute conscience que ce n'est pas le meilleur des mondes mais ils ignorent à coup sûr, ce dont est capable leurs gouvernants. S'ils savaient... Il faut vraiment remercier le Sort de nous avoir placés dans cette partie du globe. Les prières surérogatoires nous attendent.

lundi 7 avril 2008

L'opposition politique

Bien sûr, une démocratie sans opposition, c'est comme une "montagne sans crevasses"; elle a un intérêt limité. J'aime bien les opposants; ils m'orientent dans ma réflexion. Ils font leur "boulot": critiquer. Sans proposer. A tout va. A chaque instant. Pour un oui, pour un non, comme on dit. L'objectif: dessiller les yeux aux électeurs qui ont dû se tromper dans les dernières échéances pour remporter la prochaine bataille.

Il est donc normal qu'elle publie un programme alternatif; si elle a le temps d'en former un. On a eu, en France, une invraisemblance dans ce domaine: les socialistes n'auraient pas eu de programme pour les deux élections; simplement des réponses au programme de l'autre. Une sorte de complexe. Je les considère beaucoup ces gens qui arrivent à mener un débat selon leurs propres conditions et dans leurs sujets de préoccupation. Une supériorité quasi avouée par l'opposition.

L'opposition rêve d'une chose: prendre le pouvoir. C'est une lapalissade. En Turquie, pays de pas mal d'absurdités, l'erreur de cette lapalissade est elle-même une lapalissade. L'objectif du CHP (parti soi-disant de gauche, fondé par Mustafa Kemal) est de se maintenir sur la scène politique depuis sa chute en 1950. Deniz Baykal, son leader éternel, n'a jamais eu d'ambition, sinon celle de rester à la tête de son parti. Depuis 40 ans, il est dans l'opposition. C'est le seul homme politique turc d'envergure qui n'ait jamais été Premier Ministre. Son but: provoquer les gouvernements successifs, émoustiller les ardeurs putschistes et invoquer le risque dans lequel se trouve(rait) le "régime", terme chéri du CHP; défendre le régime. Contre qui ? leur demande-t-on. Contre le peuple, nous disent-ils, tout beaux qu'ils sont. Comment ? Tous les moyens sont bons.

Ils se gargarisaient d'être "le" parti d'Atatürk. Ils ne réfléchissent pas trop; si on leur demande: comment se fait-il que "le" parti d'Atatürk est boudé par le peuple ? Ils balbutient. Ils ont oublié de rappeler que le nom du parti est celui d'Atatürk, pas sa doctrine. L'illustre Sauveur éternel n'a jamais été de gauche. Un peuple qui n'aimerait pas son héros ? Impensable ! Le Turkménistan pleure toujours le "Türkmenbasi". Le CHP attend que le peuple turc lui jette enfin le mouchoir.

En réalité, il faut dissoudre les partis; s'ils ne font rien ensemble, si la majorité passe ses projets de loi "parmak hesabi" comme on dit en turc (la levée machinale de mains) et si l'opposition reste atone sur le plan législatif (sans doute pour ne pas donner de bonnes idées aux gouvernants, ils n'auront plus rien à proposer du coup), il faut repenser le système. Il faut des électrons libres; comme sous la III è République. Pas de carcan structurel.

Il faut offrir le Premier ministère à Deniz Baykal; il n'a jamais goûté au gouvernement du pays. Ne connaissant rien aux affaires politiques de haut niveau, il excelle dans la dénonciation systématique. A la limite, la dénonciation est bien quand elle est inaudible, quand elle vient d'un parti marginal d'extrême-droite ou d'extrême-gauche mais lorsqu'elle est le programme du "parti d'Atatürk", il faut craindre pour la santé de la démocratie.

"Taçlanan bas akillanir" disent les Turcs, "la tête qui ceint la couronne devient plus réaliste". Il est temps de nommer Deniz Baykal, Premier Ministre; la méthode passe ensuite, tous les moyens sont bons lorsqu'il y va de l'avenir de la République. Une République sans démocratie, un rêve, un souhait, un fantasme. Une "chose du pouvoir éternel", la Res Aeternae Potestatis. Le "pouvoir éternel", cette clique composée des hauts fonctionnaires, militaires, laïcistes, journalistes putschistes,etc.

Iktidar(celui qui est au pouvoir) ou Muktedir(celui qui a la puissance) , c'est là la question...

vendredi 4 avril 2008

La Géorgie attendra pour affermir son intégrité

Assurément la Géorgie est en colère. Sa candidature à la candidature à l'OTAN a été gentillement refusée. Motif: situation interne difficile. Officieusement, pression de la Russie.

Les Ukrainiens sont assez divisés sur ce sujet; il est donc normal d'attendre un minimum de cohérence et de majorité pour les inviter. Les Géorgiens veulent adhérer à l'OTAN (80 % de oui lors du référendum de janvier); ni par volonté ni par conscience mais pour éviter un éclatement du pays. L'OTAN est la seule structure qui leur permettrait de tenir en laisse les "séparatistes". "Un tel bagage les a privés de billet d'entrée à l'OTAN" assure un analyste. Rappelons également que les Géorgiens, si prompts à rétorquer aux Russes, accueillent une base militaire russe et ce jusqu'en... 2017. Il eut été bizarre de défendre la Géorgie alliée contre la cinquième colonne russe.

Les Russes, fiers qu'ils sont, n'admettent même pas que l'on puisse penser à une possible adhésion de la Russie à l'OTAN. Nous sommes bien comme ça et nous avons les ressources nécessaires pour assurer, seuls, notre défense s'est dépêché de rappeler Poutine. L'OTAN est une "menace directe à sa sécurité". Faut pas rêver.

La Géorgie, pas moins fière, a salué la victoire historique du pays: ils ont reçu l'assurance d'intégrer un jour l'OTAN. Une avancée, c'est une avancée. En réalité, personne n'est contre son adhésion; les Géorgiens ont dû mal comprendre. Ils seront, un jour, membres de l'OTAN. C'est écrit au ciel. La question est de déterminer ce jour: sans doute après le règlement des conflits abkhaze et ossète; mais "Non, non nous disent-ils: c'est l'intégration à l'OTAN qui va nous permettre de règler la situation pas le contraire". Inertie et résistance en perspective.
Une dernière leçon à tirer de ce sommet: les Russes ont obtenu, de facto, un droit de veto sur les adhésions à l'OTAN. Rien d'anormal, car la sécurité en Europe contre la Russie, c'est précisément n'avoir rien compris à la philosophie de l'OTAN. Assurer la paix en provoquant "l'ennemi", c'est tout bonnement trahir la paix.