vendredi 18 juillet 2008

Le clocher et le lucre : les étincelles des relations internationales

La gratitude, la fidélité, le respect sont des valeurs en érosion. Cette lapalissade a du mal à se vérifier dans les relations internationales où le clan est tout. "Il est Slave comme moi, je le soutiens", "Il a quelques gouttes de sang turc, je le défends", "jadis, c'était mon esclave, je continue à le protéger", "il est musulman, il faudrait me passer sur le corps pour l'atteindre", etc.
Faire de l'épate. Pourquoi pas.

Omar al-Bachir vit des moments difficiles. Son Excellence vient de recevoir l'invitation du Procureur Moreno-Ocampo de bien vouloir rejoindre les geôles de La Haye. Grief: génocide (en réalité, le procureur ne fait que demander à la Chambre préliminaire de bien vouloir le poursuivre). Il ne faut pas mélanger les torchons avec les serviettes; c'est du sérieux. Le Président Uribe est accusé d'avoir utilisé le drapeau de la Croix Rouge pour mener à bien son illustre opération militaire. "Mais alors, petit malin, t'as donc libéré Ingrid perfidement, dis donc, quelle dégueulasserie ! Fourbe. Allez rends la, on recommence". Evidemment, le commun des mortels ne s'intéresse pas à ces débats scolastiques. Histoire de dentelle. La politesse dans le combat. "Oui mais attendez, j'ai libéré des otages, je n'ai tué personne". On s'en fout. Crime de guerre. Parenthèse close.


Ce sinistre Président, dont le nom signifie exaspérément "annonciateur de bonnes nouvelles, beau, ange", avait jadis reçu les honneurs lors de sa visite d'Etat en Turquie. Lui, un "islamiste en gerbe", son homologue turc un soi-disant "islamiste en herbe". Une rencontre idyllique. En grande pompe. L'hospitalité turque. Le Premier Ministre Erdogan avait même voulu se la jouer : "rien de grave, c'est abracadabrantesque".

Bien sûr dans ces moments de torpeur, il n'a qu'à décharger sa rate et les épaules se bousculent : les Chinois trouvent les bons arguments : "mais enfin, il y a une mission de paix qui a déjà assez de mal à s'enraciner, ne brusquons rien"; les Russes, par tradition, acquiescent, le frère Chinois a raison; les Africains et les Arabes sont mécontents, on les comprend : "pas touche à notre frère, vous voulez nous coloniser hein, allez dites-le". Le registre dérape souvent dans ces cas-là.
Jadis, Milosevic avait également été indûment inquiété; les négociations continuaient et le Président Ahtisaari était irrité : on n'accuse pas un dirigeant sur le point de conclure un accord. Finalement, il a eu tort, les deux ont pu se combiner. Accusation du TPIY puis accord et enfin procès. Son coeur a lâché, c'est un autre problème...

Balzac aurait applaudi le réveil de cette "pesante diplomatie qui (...) fait trois pas dans un boisseau". D'ailleurs, le Secrétaire Ban en profite pour hausser le ton : "oui, il faut jongler entre justice et paix mais bon, il faut savoir délaisser les mauvaises traditions". Du coup, Omar compte sur ses amis de coeur et de religion et ses camarades de circonstance; son ministre chargé des affaires humanitaires (sic) est lui-même sous le coup d'un mandat d'arrêt. On est au bout de notre latin.

La justice internationale fait des remous; les procureurs font ce qu'ils peuvent. Carla fixait bien les yeux de ses interlocuteurs serbes : "Mladic et Karadzic". "Tu nous emmerdes avec tes manies; lâche-nous, on veut entrer en Europe, printaner". Ils sont toujours en fuite. Officiellement, les Serbes les ont perdus de vue...

La justice harcèle. Mais le Conseil de sécurité a le dernier mot; contre toute raison, il a le luxe de décréter : " les raisins sont trop verts". C'est sans doute mieux que de ne pas en fiche une secousse; la diplomatie est claire: l'art d'avancer à pas mesurés. Et comme on dit, il n'y a que le premier pas qui coûte. La suite n'est que patience. Allez Omar, prépare-toi...