jeudi 3 juillet 2008

L'Honneur ne devrait pas avoir de pays...

La "fusillade" de Carcassonne s'est soldée par la démission du Chef d'état-major de l'armée de terre, le Général Cuche. Les militaires font la moue. Hervé Morin, le soi-disant ministre chargé de veiller sur eux, tente une explication; un écheveau de mots dans lequel il est passé maître : "le Général Cuche a montré qu'il était responsable de l'armée dont il a la responsabilité". Bien. Chirac leur avait coupé les ailes en mettant fin à la conscription, Sarkozy leur tord le cou avec le Livre Blanc. C'est le Chef des Armées.
Alors que certains voulaient ainsi faire montre de leur conception de la superbe, d'autres "collègues" se trouvaient en mauvaise posture en Turquie. Des généraux en mauvaise posture en Turquie ? Une blague ! Non, non.
Les juges d'instruction chargés d'enquêter sur la cellule factieuse "Ergenekon" ont placé en garde à vue deux généraux en retraite, un journaliste et le président de la Chambre de commerce d'Ankara. C'est la "nouvelle vague" des gardes à vue.
Evidemment, les généraux ne poirotent pas dans une pouillerie; les "Pachas" (c'est ainsi qu'on les appelle en Turquie) ont droit à des salles climatisées. Un privilège qui n'indigne personne, bien sûr; le fait de les "inculper" est déjà une avancée. Les fioritures sont presque contingents.
Le Commerçant, dressé sur ses ergots comme d'habitude, a lancé aux journalistes qui lui demandaient les raisons de sa neutralisation : "Parce-que j'aime Atatürk". Il y a quelques jours, une femme voilée, "enturbannée" comme on dit, avait déclaré à la presse qu'elle préférait Khomeiny à Atatürk; une enquête avait prestement été lancée. On ne comprend plus : aimer et détester Atatürk sont logés à la même enseigne...
Le Journaliste, un sigisbée d'Ilhan Selçuk, l'autre dinosaure qui avait été placé en garde à vue quelques mois plus tôt, a opté pour le silence : il refuse de parler aux philistins et préfère se confesser directement au juge. Les caprices ont la vie dure...
Deniz Baykal, leader du CHP (parti dit de gauche) assume la charge : "c'est un procès politique" fustige-t-il; lui qui appelait à plus de respect à l'endroit des juges et à la patience pour le procès de l'AKP. Double standard. Le râle de certains intellectuels se fait également entendre; l'armée, n'en parlons pas. Les gardés à vue sont des paladins de la République, personne ne croit à leur culpabilité, ça doit être un complot. L'Etat contre l'Etat profond. Une pure invention, jurent-ils à l'unisson.
Rappelons tout de même que l'un des généraux "saisis" est celui qui a planifié un coup d'Etat contre le Gouvernement en place. C'est son collègue de la Marine qui l'avait indirectement "balancé". Mais personne n'avait osé lui demander des comptes. On n'arrête pas un Gardien de la Révolution... Le journal Taraf a pu s'enorgueillir : "les putschistes, enfin, devant la justice". Un autre journaliste "aux ordres" ne cache pas sa réjouissance : "la révolution dévore ses enfants"; Tel est pris qui croyait prendre.
Justice immanente, justice imminente, chacun y va de sa petite rengaine. Ca secoue fort certes mais que faire ? Osons reprendre le refrain des opposants qui se lèchent les babines à l'idée de voir l'AKP interdit: dura lex sed lex.