mardi 12 août 2008

Saakachvili et son joli coup de pied dans la fourmilière

Je suis de souche ossète. Il était donc normal que je prisse position en défaveur des Géorgiens. Je n'ai rien contre eux; je n'apprécie pas beaucoup leur Président, c'est tout. "Mais t'es fou, il parle foultitude de langues, voyons, il est civilisé ! Tais-toi !".

C'est un benêt. Il ne cesse de réclamer "ses" territoires provisoirement alargués. Il a raison dans sa logique. Bête quand même. "Vous êtes Géorgiens, vous êtes nous, allez, au bercail !". Le problème, c'est que le bercail n'a pas véritablement été le leur. Tout le monde appelle au respect de l'intégrité territoriale de la Géorgie : "mais il fait ce qu'il veut, chez lui, Saakachvili, voyons, c'est quoi ses manières de s'asseoir sur cette vérité !". Drôle d'intégrité, il en vient aux armes pour le prouver. Quand les Russes massacraient les Tchétchènes, tout le monde mettait son grain de sel. Les Russes fronçaient les sourcils : "Quoi ? Qu'est-ce tu regardes ? Allez, excuse-toi".
Il fallait le laisser, Misha : un peu de massacre et ensuite, la communauté internationale, les yeux embués, aurait consenti : "allez, vous êtes une nation indépendante". Les Juifs et les Kosovars ont dû pleurer avant de se dérider "un peu". "Eh eh, vieux, l'indépendance, ça s'acquiert à l'ancienne...".


Il est allé à Gori, avec son gilet bare-balles : à peine déclamé quelque menace, on l'a vu prendre ses jambes à son cou. Et hop un courant d'air. La population n'a pas ce luxe... Il a retrouvé haleine dans la capitale : "mes chers frères, la lutte continue, les ogres veulent nous engloutir, nous résisterons, regardez, les chefs d'Etat accourent à notre chevet... euh, nos côtés". C'est celui-là même qui s'est empressé de signer unilatéralement un cessez-le-feu. Psychologie étrange. Il a même annoncé le retrait de son pays de la CEI. Ciao.

La Russie protège, officiellement, ses citoyens. Pour éviter un massacre. On les croit, bien sûr. Les Ossètes sont bêtes aussi. Restez où vous êtes. Patience et modération. "Non, on veut s'en aller, on veut s'accoler à l'Ossétie du Nord et vivre en paix chez les Russes". Là, je dis non. Je préfère, et de loin, une large autonomie sous la houlette géorgienne qu'une étreinte russe. La rancune ne passe pas...

Ils se réjouissent : "on a tué plusieurs centaines de soldats russes, hahaha", "arrête de balancer, seulement 18 morts, 52 blessés et 14 disparus, nanik". D'autres font ce qu'ils peuvent : les Français évacuent les Européens, les Russes évacuent les Ossètes vers le Nord, les Turcs prient de ne pas causer trop de dégâts aux environs de l'oléoduc, etc.
Un casseur d'assiettes, celui-là. Il doit être content. Bien sûr, on ne démissionne pas en pleine guerre; ça lui fait une belle jambe : attaquer, reculer, pleurer. Kissinger disait jadis qu'une grande puissance ne se retire jamais éternellement et qu'elle ne se suicide pas pour secourir ses alliés. La Russie et les Etats-Unis viennent de lui donner raison. Mais Mikhail ne savait pas... Une leçon. "Allez, frère Caucasien, arrête de faire ton Castro et retire-toi dans un monastère, tu n'as rien compris". Un journaliste turc, Mehmet Altan, le taquine : "jette un coup d'oeil sur l'histoire des compétitions échiquéennes et lis un peu Tolstoï, tu comprendras ta misère". Je suis navré, les fourches caudines russes sont les plus à plaindre, tu croyais vraiment à l'histoire de la cuisse de Jupiter ? Achille, dit lui...